Retour à l'accueil 

 

Lettre de Noël 2012 Lettre de Noël 2011 Lettre de Noël 2010 Lettre de Noël 2009 Lettre de Noël 2008 Lettre de Noël 2007 Lettre de Noël 2006 Lettre de Noël 2005 Lettre de Noël 2004 Lettre de Noël 2003 Lettre de Noël 2002 Lettre de Noël 2001 Sommaire des archives

Madame, Monsieur,

Cher(e) Ami(e) et Client(e),

Un joyau de la tonnellerie du XVIIIème siècle

Saviez-vous qu’il existe dans la Cave Historique des Hospices de Strasbourg un tonneau de 1472 dans lequel se trouve encore, entretenu et régulièrement ouillé, le vin le plus vieux du monde ? Un des derniers dégustateurs méritant de ce breuvage relique en a été le Général Leclerc libérateur de la ville en 1944.

Amateur inconditionnel de grands vins blancs vieux, le privilège d’avoir pu humer un nectar aussi anthologique, m’a d’office convaincu de participer sans hésiter à la rénovation et à la formidable renaissance de ce patrimoine historique comprenant entre autre des pièces rares et précieuses de tonnellerie.

Aussi je suis devenu, comme quelques autres valeureux confrères vignerons alsaciens, propriétaire d’un vieux foudre rénové de 12,34 hl dans lequel je fais élever un potentiel de 1600 bouteilles d’une cuvée choisie chaque année dans un autre cépage et que j’apporte à Strasbourg après les vendanges.

La plus grande partie du vin me revient au mois de septembre suivant, embouteillé et habillé de son étiquette portant la symbolique Croix des Hospices. Le solde est vendu directement par le cellier de l’hôpital qui dispose d’un magasin et les bénéfices sont réinvestis dans l’achat d’appareils médicaux.

Si, aujourd’hui les malades recevaient encore, comme il était d’usage au Moyen Age, leur ration quotidienne de 2 litres de vin pour leur nourriture spirituelle et pour contribuer à l’apaisement de leur soif et de leurs douleurs, mon tonneau pourrait à peine secourir deux personnes par an…

Depuis la fin du 20^ème siècle, les choses ont beaucoup changé, le produit de la treille, de médicament et d'aliment, est devenu un culte et une culture du plaisir sensoriel et intellectuel du moins pour l’oenophile averti que nous tentons tous de devenir.

Hélas, notre Ministre de la Santé n’a pas pour objectif ce bonheur, mais se gausse de réactiver, d’ailleurs avec une fausse vigueur la Loi Evin, sensée limiter tabagisme et alcoolisme. Exercice difficile cependant, car notre hypocrite décideur ne peut risquer de mettre en faillite l’appareil de l’Etat qui justement se sert des taxes du tabagisme et de l’alcoolisme pour financer 40% du coût de la semaine des 35 heures. Et s’il y a un scandale dans l’application de cette loi, c’est bien celui-ci.

Aussi pour assurer la pérennité de ce financement démentiel, notre bon docteur Kouchner a pris la décision de ne pas faire voter une nouvelle loi destinée à empêcher les jeunes enfants et les adolescents de fumer à l'école : il faut bien former les futurs payeurs... (Journal DNA, 31 mai 2001: "Kouchner recule : le Ministre de la santé affirme qu’il n’était pas question de régler le tabagisme chez les jeunes par une interdiction aux moins de 16 ans et cela... après avoir signé une charte de l’organisation mondiale de la santé préconisant une telle mesure !").

Dès lors, on palabre et on agit le plus inefficacement possible pour remédier aux 60000 morts par an par tabagisme, aux 45 000 morts par an par alcoolisme (essentiellement du fait de l’alcool importé : whisky, tequila, vodka, bière, etc...) et on exhibe très fort les morts sur la route (8 500 par an) pour justifier l'acharnement de la maréchaussée sur le tiroir caisse des conducteurs.

Ainsi on arrive à croire à l’efficacité des contrôles d’alcoolémie intempestifs sur des automobilistes n’ayant commis aucune faute de conduite et avec des normes fort discutables (les Suisses sont toujours à 0,8 gr) et de toute façon scandaleusement discriminatoires.

Par contre aucune volonté ne s’est dessinée jusqu’à ce jour pour faire vérifier de façon courante par un représentant de l’ordre, le contenu des coffres des voitures des terroristes ou autres malfaiteurs. Cela relève toujours d’une intolérable atteinte à la vie privée de ces Messieurs, même le Premier Ministre en convient !

Combien de morts avons-nous de moins sur la route depuis l’abaissement du seuil de l’alcoolémie de 0,8 à 0,5 grammes ? Par contre l’augmentation de l’insécurité des Français dans des proportions devenues proprement insupportables n’est-elle pas due, au moins en partie comme je l’ai toujours pensé, au détournement du rôle des gendarmes, qui n’ont plus le temps, ni les moyens et surtout plus les directives de s’occuper de la vraie délinquance.

Ces sujets qui fâchent, car révélateurs des contradictions de notre société seront donc gravement à l’ordre du jour lors de la prochaine campagne présidentielle. Chers amis, pour éviter que les saboteurs et les assassins de notre belle culture latine, enviable et enviée, ne gagnent encore des points, appliquez autour de vous avec l’enthousiasme le plus chaleureux la maxime de Montaigne :

" Versez-leur du bon vin, ils vous feront de bonnes lois "

Et que cette cuvée des Hospices de Strasbourg, qui fait partie du patrimoine de la France, que je commercialise pour la première fois cet automne, vous aide dans votre démarche : non le bon vin de France n’est pas une drogue, ni même de l’alcool comme on veut bien nous le faire croire insidieusement tous les jours à petites doses. Il est notre culture, fait partie de notre existence, de ses moments de plaisirs et de bonheur... Il nous différencie des barbares, nous distingue des pisse-froid et nous aide à supporter les difficultés de la vie, les bêtises et les aberrations de notre société.

Il nous apporte aussi vigueur, combativité et sens critique : un vin bouchonné reste un vin bouchonné, qu’on se le dise !

Il me reste à vous dire merci pour votre confiance et votre fidélité, grâce à vous j’encave cette année ma 20^ème récolte. Mon parcours a été passionnant mais difficile sur le plan de l’équilibre financier car on ne commence impunément une affaire à partir de rien. Merci à toutes celles et à tous ceux qui me soutiennent avec les achats en primeurs et qui m’assurent donc mes prises de risques au niveau des récoltes extrêmes, vendanges tardives ou vin de glace.

Le millésime 2001 inaugure bien le XX^ème siècle. La qualité est de nouveau au rendez-vous mais, à cause d’un mois d’octobre assez sec, les Sélections de Grains Nobles seront rares car il y a eu peu de développement de pourriture noble. Par contre le temps a été très favorable à la production de Grands Crus Riesling, Vendanges Tardives et de Grands Sylvaner Cuvée Z et Hors La Loi.

Pour vos colis cadeaux et colis d’affaires, je reste comme toujours à votre disposition pour toute proposition adaptée à vos souhaits et besoins.

Joyeuses fêtes et recevez mes voeux les plus vineux pour l'An 2002 !

Soultzmatt, 2 novembre 2001

Votre vigneron, Seppi Landmann