Seppi assurant le lien
entre les convives au cours de ses navettes entre les salles |
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Contrairement à l'an
passé, la configuration de l'espace n'a pas permis un échange direct
entre les convives. Seppi s'est donc déplacé de table en table pour
recueillir les impressions des uns et des autres. Impressions dont
il transmit la synthèse lors de son tour suivant. Il ressort de ce
"sondage" que la "pensée unique" n'était pas à l'ordre du jour.
C'est fort heureux. Il est en effet réjouissant de voir que les
vrais épicuriens ne se laissent pas enfermer dans des carcans par
des a priori immuables.
Patrick Bottcher,
l'un des intervenants parmi les plus actifs en 2009, a publié sur
ses blogs une analyse très fine, précise et complète des accords
mets/vins. Avec son aimable autorisation, nous la reprenons quasi
intégralement ci-dessous. Nous le remercions vivement pour cette
contribution de grande qualité.
Patrick Bottcher : un dégustateur passionné qui se déclare
volontiers "Monomaniaque" et "Fou d'Alsace". |
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Amuse-bouche
Magnum de Crémant Cuvée Erotique
(récolte 1996)
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Commentaire de
Patrick Bottcher :
Les hostilités commencent par la
mise en appétit des papilles avec un Crémant « Cuvée Erotique »
Magnum 1996 (rien à voir avec le 96 de l’étiquette qui fait
évidemment, à l’envers, référence à d’autres galipettes).
Notre hôte restaurateur du jour
semble un peu réticent à servir ce choix de Seppi, par peur,
probablement d’une évolution marquée.
Il n’en est rien : avec une robe
dorée, encore jeune, le nez de ce vin explose de fruits blancs et
de floral. C’est très frais ! En bouche, l’acidité encore bien
vivace fait persister cette impression de fraîcheur. Le milieu de
bouche est sur le fruit avec une rondeur qui rappelle la présence
probable d’un peu de sucres résiduels. La finale est belle et
longue toujours entre fruits et rondeur. A ce stade, il vrai que
l’on peut se dire que sur un plat, cette structure peut se révéler
plus intéressante que seule.
La confirmation vient avec l’arrivée
des amuse-bouche salés où l’acidité et la rondeur du
crémant font merveille, particulièrement avec les scampi épicés.
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Entrées et Vins |
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Petite Croquette
Saint-Jacques enrobées de scampi
Salade au Canard fumé
Saumon en Roulade
Riesling Vallée Noble 2008
Pinot Gris Vallée Noble Cuvée Sophie Marceau 2007
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Commentaire de
Patrick Bottcher :
On nous propose ensuite un
Riesling Vallée Noble 2008 et un
Pinot Gris Vallée Noble
Cuvée Sophie Marceau 2007.
Le riesling a une robe jaune-vert
encore très claire. Le nez se délivre lentement avec un poil de
douceur, des arômes citriques marqués et du floral. On est plus
ici sur le registre de la finesse que de la puissance ou de la
grosse complexité. La bouche est bien équilibrée avec une acidité
en balance avec les sucres pour donner une impression tactile de
sec, avec des arômes citriques et peut-être une petite pointe
d’amertume qui vient chapeauter l’édifice. La longueur est belle,
assez sur la fraîcheur et la finesse, ce qui rend ce vin, encore
très jeune, bien prometteur.
Le pinot gris offre une robe
nettement plus contrastée avec un jaune doré très intense. A
nouveau, le floral donne le ton au nez, mais plus circonstancié
par des épices assez marquées. La douceur est aussi plus
perceptible. En bouche, si c’est globalement équilibré, l’acidité
me paraît trop en retrait, laisser la place aux sucres qui rendent
le vin un peu lourd au palais.
Mais comme ce vin est opposé en comparaison au riesling, un effet
de séquence est aussi à prendre en compte.
Quoiqu’il en soit,
ce sont deux vins finalement très opposés donc, surtout sur leur
bouche que nous allons mettre maintenant face aux entrées.
Sur la salade, un classique du
Shanghai, le riesling donne toute sa fraîcheur et sa jeunesse pour
un accord parfait, presque fusionnel. Par contre le pinot gris se
montre catastrophique face aux acétiques de la salade. C’était
assez prévisible. S’il s’en sort un tout petit mieux sur le saumon
et surtout sur la croquette, le pinot gris et ses sucres ne
parviennent pas à faire décoller ces deux mets alors que le
riesling donne de la fraîcheur à l’ensemble pour lui donner comme
un coup de fouet. C’est plus qu’agréable comme accord.
Restent les Saint-Jacques, où, là,
j’avoue que l’accord en opposition avec le pinot donne un
assemblage un peu Rock’n’roll, mais qui a du peps ! A réessayer,
sans nul doute.
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Poisson / crustacés et
Vins |
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Filet de Sole au Tofu et petits Légumes cuits à la vapeur
Scampi sautés à sec, Poivre et Sel
Riesling Grand Cru Zinnkoepflé 2002
Gewurztraminer Vallée Noble 2008 |
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Commentaire de
Patrick Bottcher :
Avant de passer au plat suivant,
nous avons l’occasion de goûter seuls les vins qui
l’accompagneront, soit : le Riesling Grand Cru Zinnkoepflé 2002
et le Gewurztraminer Vallée Noble 2008.
Le riesling présente une couleur
dorée marquée par une certaine évolution. Le nez est pur, marqué
par les arômes secondaires typiques des rieslings 2002 avec des
fruits jaunes, du miel, de la cire et une pointe de pamplemousse
rose. L’impression de complexité est au rendez-vous. Les
dégustateurs moins avertis à ce type de vins versent dans les
notes pétrolées, ce qui m’étonnera toujours comme perception… à
chacun son nez, en fait !
En bouche, fraîcheur et complexité
des arômes précités au nez font excellent ménage avec une finale
où minéralité, finesse, harmonie et fraîcheur sont à l’unisson.
Le terroir parle. C’est grand, et c’est ce type d’évolution dans
les vins qui m’accroche tant en Alsace.
Le Gewurztraminer est doré très
clair, déroutant pour ce type de cépage. Le nez est un peu moins
complexe, moins séducteur parce que la douceur fait probablement
un peu trop le ménage. Par contre, on est charmé par l’aromatique,
loin de proposer une gamme variétale où pierre et fruit
dominent majestueusement les litchis et rose plus classiques. En
bouche, l’acidité du 2008 construit l’attaque mais est vite
tempérée par les sucres résiduels assez maîtres du terrain. On
retrouve toutefois des fruits croquants qui donnent pas mal de
plaisir. La finale est très longue, fine, atypique en terme d’arômes
variétaux et le tout serait vraiment très prometteur si de
l’amertume ne venait pas faire le trouble-fête en fin de bouche.
Mais n’oublions pas que ce vin est un nouveau-né, laissons-lui le
temps.
Amusant contraste
dans les avis du groupe : peu de tables parviennent à dégager un gagnant sur un
des deux plats. Personnellement, je trouve que le Gewurztraminer s’en sort
admirablement bien sur les deux plats, particulièrement sur le
tofu qu’il fait rebondir. Sur les scampi, l’association de ce
dernier est plus condescendante. Le problème du riesling sur les
deux plats est probablement que la finesse de sa structure et de
son aromatique sont un peu écrasés par les plats où les
caractéristiques asiatiques ont tendance à noyer ses belles notes
secondaires. Finalement, encore une démonstration de plus que vins
dégustés seuls ou en association sont deux mondes souvent bien
distincts.
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Viandes et Vins |
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L'Agneau
sauté aux Asperges et Shiitakes
Cailles aux Fruits exotiques et Noix de Cajou
Pinot Noir Sabot de Vénus 2000
Pinot Gris Bollenberg Vendange Tardive 2001
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Commentaire de
Patrick Bottcher :
On attaque une troisième opposition
chère à Seppi, soit un combat entre un Pinot Noir Sabot de
Vénus 2000 et un Pinot Gris VT Bollenberg 2001
Le pinot noir a une robe encore fort
jeune. Le nez confirme cette impression avec une retenue que l’on
rencontre encore souvent dans les pinots noirs alsaciens dans leur
jeunesse. Le fruit est tout de même présent, mais on sent qu’il
doit encore attendre pour se livrer. La bouche est bien
équilibrée, plus sur la finesse que la puissance avec des tanins
très soyeux et un fruit plus intense que sur le nez. L’absence
d’impression alcoolique rend le vin toutefois très droit à la
limite de l’impression de sec, surtout sur la finale. A revoir,
indubitablement.
Le pinot gris VT, disons-le
directement, a tout pour lui : la robe est comme un calice doré
sortant de l’orfèvrerie, le nez est une merveille jubilatoire de
précision, de puissance veloutée où arômes secondaires et
tertiaires s’assemblent généreusement sans jamais se disputer
quelque podium. C’est immense de complexité. La bouche est
évidemment au diapason, pas très étonnant, finalement sur ce
magnifique millésime qu’est 2001. Tout y est : fraîcheur de
l’acidité qui n’a pas faibli, fusion entre sucres et fruits de
tous bords, longueur inouïe, bref du grand art. Une émotion comme
rarement sur une VT de pinot gris. S’il vous arrive de croiser
cette bouteille, n’hésitez pas un instant !
On en reviendrait presque à oublier
qu’il va falloir associer ce dernier vin et son opposant avec les
plats suivants : Agneau sauté aux Asperges et
Shiitakes puis Cailles aux Fruits
exotiques et Noix de Cajou.
Sur papier, l’idée d’une VT sur des
cailles et surtout sur de l’agneau ferait fuir plus d’un quidam
qui serait plus rassuré par l’idée de placer un rouge
avec de telles viandes… et pourtant, c’est évidemment au contraire
qu’on assiste. Le pinot noir est purement catastrophique avec les
cailles où tout s’oppose et où le vin ne fait que ressortir ses
tanins secs et son amertume. Sur l’agneau, c’est à peine mieux
parce que le plat est bien trop velouté pour un vin droit comme ce
pinot noir. Alors qu’au contraire, sur l’agneau, la sucrosité
modérée de la VT et le velouté du plat font très bon ménage, se
côtoyant sans vraiment fusionner.
Sur les cailles, la VT est
indescriptible de bonheur : on atteint tout simplement la
perfection dans le fusionnel. Un tout grand moment, le plus grand
moment de la soirée, à mon avis.
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Dessert et Vins |
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Duo
de Glaces et d'Agrumes
Riesling GC Zinnkoepflé Vendange Tardive 2006
Gewurztraminer Grand Cru Zinnkoepflé Vendange Tardive 2007
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Commentaire de
Patrick Bottcher :
Avant d’aborder le dessert, la
dernière paire de vins nous est proposée, soit un Riesling
Grand Cru Zinnkoepflé VT 2006 et un Gewurztraminer Grand
Cru Zinnkoepflé VT 2007.
Le Riesling VT a une robe dorée
brillante. Le nez est très expressif à la fois sur des agrumes
comme la mandarine, des fruits blancs et quelques notes
champignonneuses, le tout avec une grande précision. L’attaque de
bouche est remarquable de fraîcheur pour une VT, particulièrement
de ce millésime 2006. La puissance du terroir s’exprime ensuite
avec beaucoup de minéralité associée aux fruits, le tout enrobé
par un moelleux jamais pâteux. Une fois de plus, Seppi s’attaque à
ce type de vins comme un orfèvre. C’est tout simplement splendide.
Le Gewurztraminer VT entretient plus
le débat. Si la robe est irréprochable, la sucrosité monte très
nettement d’un cran et c’est perceptible dès le nez qui n’atteint
jamais la précision cristalline du Riesling VT 2006. On a surtout
l’impression que ce vin, d’une puissance extrême n’a pas encore
réussi à fusionner ses composants et que le sucre, impressionnant,
devra prendre quelques années pour s’assagir et s’intégrer afin
que l’acidité puisse réellement rééquilibrer les débats. Quoi
qu’il en soit, vous l’avez compris, on est ici face à un monstre…
en gestation.
Place au dessert : Duo de
Glaces et d’Agrumes.
Le riesling passe très bien tant sur
la glace que sur les agrumes, particulièrement sur le pamplemousse
rose. Sa fraîcheur fusionne bien avec l’acidité du fruit et sa
sucrosité arrondit le plat sans le rendre plus fade. Par contre,
avec le gewurztraminer, le sentiment de beaucoup est que trop de
sucre tue le sucre. Riesling, vainqueur, donc par KO.
En conclusion, nous avons une fois
de plus passé une excellente soirée alliant la cuisine du Shanghai
d’une grande finesse au tempérament enjoué de Seppi et de ses
vins. A l’exception d’un ou deux accords plus faciles, le trublion
du Zinnkoepflé a choisi de tenter des accords plus extrêmes qui
ont engendré souvent le débat, et c’est ce qui fait le charme de
cette rencontre annuelle où certitudes et idées préconçues sont à
ranger au placard.
Un tout grand
merci donc à l’équipe du Shanghai ainsi qu’à la joyeuse bande qui
accompagne Seppi dans ses aventures gargantuesques. C’est toujours
un plaisir de vous revoir ! |
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Quelques vues de
la salle durant le repas |
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Vers Shanghai 2009 |
Vers Shanghai 2011 |
Vers Shanghai2012 |
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